Un peu de sport, tranquil ? [S. Hiroki]

Et puis ça lui paraissait si naturel. Ca Leur paraissait si naturel. C’était comme si sa tête avait toujours eu sa place sur cette épaule, comme sa main auparavant. Comme si ? Non. Il avait sa place sur cette épaule comme dans tout l’être d’Akira. Il avait sa place parce que lui-même quelque part, était Akira. Et l’Oyabun assis devant était Hiroki. L’un était l’autre et l’autre était un. Ca pouvait sembler ridicule ou un peu trop sentimentale. Mais c’était tellement vrai qu’il ne pouvait penser autrement. Ils étaient différents en de nombreux points. Lui-même était sans doute plus turbulent, plus joueur, plus capricieux que ne l’était Akira. Son ami était plus sage, gardait un sang-froid irréprochable en n’importe quelle situation. Sur son visage même, on voyait qu’il était sans doute cent fois plus calme qu’Hiroki. Et pourtant, leur façon de pensée était identique. Et ce quelques petites différences, sans grande importance, au lieu de les séparer les faisaient se compléter. Chaque pièce de l’un avait sa place dans l’autre. Il se comprenait avec une facilité déconcertante pour ceux qui n’avaient pas la chance d’avoir quelqu’un de si proche d’eux. Ca en avait excité des jalousies, une entente aussi exceptionnelle ne passait pas inaperçu et si elle faisait l’admiration de beaucoup, elle contribuait à nourrir la rancœur de beaucoup d’autres. Cette rancœur qui n’appartiendrait qu’aux autres maintenant, puisque Hiroki n’avait plus de raison de haïr Akira, n’est ce pas ? Et pourquoi faire ? Même s’il avait eu toutes les raisons du monde il se rendit compte à cet instant qu’il n’aurait absolument pas voulu recommencer à le détester. Il voulait juste le garder auprès de lui, et pour longtemps. Oh oui, très longtemps.

C’était bête à dire, mais Akira était sans doute un peu comme son âme sœur non ? Après tout, il n’était pas précisé de quelle façon devait s’aimer de telles âmes et eux avaient choisis l’amitié. Une amitié qui avait résisté à leur bêtise. Une amitié qui de ce fait, leur paraissait des plus indestructibles. Si eux-mêmes avec tous les souhaits du monde n’avaient pu en venir à bout, comment quelqu’un d’extérieur pourrait y faire quelque chose ? La proximité de leurs pensées était une chose qu’on voyait rarement, et d’ailleurs Hiroki ne se souvenait pas avoir jamais vu des amis aussi proches qu’ils l’étaient tous les deux. Il sourit et se dit avec plus ou moins d’amusement que oui, Akira était sans doute son âme sœur et qu’il avait bien failli la perdre. Il ferait en sorte de ne plus jamais faire une telle erreur. Il ferma un instant les yeux et soupira. Qu’il était bon, vraiment de se sentir à nouveau si bien. C’était comme si plus rien ne pouvait plus jamais lui arrivé, comme si tout à coup, sa vie lui apparaissait sous un jour nouveau et qu’il ne pourrait plus jamais être malheureux. Et ce serait sans doute le cas. Qu’est ce qu’étaient tous ces petits tracas quotidiens face à la certitude de pouvoir retrouver Akira dès qu’il le voulait ? Oui, ça n’avait plus la moindre importance. Plus rien n’avait vraiment la moindre importance à part le fait qu’il pourrait maintenant rire de nouveau avec son ami. Son ami. Ces deux mots étaient si doux dans ses pensées. Le sien et à personne d’autre. Natsuki, même s’il l’aimait sans doute infiniment elle aussi, n’avait pas cette place qu’Akira occupait. Cette place qui lui réchauffait le cœur tout entier. Natsuki se faisait plus discrète, elle était cette toute petite flamme qui le faisait sourire. Mais elle n’avait pas le don d’effacer souffrance et ennui, comme le faisait si facilement Akira. Comme il l’avait toujours fait.

L’affection qu’il lui portait était sans doute exagérée. Il se doutait bien qu’il devrait un jour y mettre un frein. Car la jalousie s’attisait si facilement qu’ils n’étaient pas à l’abri de nouvelles disputes, mais ils sauraient y faire face sans doute. Parce qu’une fois qu’on traversait ce qu’ils avaient traversé, cet océan de bêtises et de ridicules, ils pourraient sans doute dépasser n’importe quel désaccord à présent. Mais ils étaient encore jeunes, et un jour chacun souhaitera prendre sa propre direction, il y aura forcément de nouvelles rencontres et même si cette pensée ne lui plaisait déjà qu’à moitié, il se devrait d’y faire face le moment voulu. Il devrait mettre sa jalousie et son égoïsme de côté et apprendre à partager. Ce qui, naturellement, n’avait pas lieu d’être pour le moment. Pendant une année encore, avant qu’ils ne se choisissent un nouveau chemin, Akira restait Son Akira. Son ami. L’ami d’Hiroki. Et il n’y avait pas à discuter là-dessous. Une moue déterminée s’installa sur son visage et il allait ôter son menton de l’épaule de l’Oyabun lorsqu’il sentit sa main sur sa tête. Il sourit, appréciant le contact si longtemps espéré de son ami. Un rire lui échappa à la suite des paroles d’Akira et il lui rendit son regard, avant d’enlever sa tête pour que le jeune homme puisse se relever, et lui-même le suivit quelques secondes après. Ils restèrent un moment face à face, et Hiroki vit soudain une main se tendre vers lui. Il n’avait pas perdu son sourire précédent, et il ne pu donc que l’agrandir un peu plus, si c‘était possible. Il pensait à la symbolique de ce geste, cette main que tout deux avaient maintes fois voulu tendre à l’autre sans oser. Cette main qui s’était toujours refermée avant que l’autre n’ait le temps de la saisir, ou même de la voir tout simplement. Elle signifiait tellement de chose qu’Hiroki sentit son cœur se serrer. Les regrets mettraient sans doute un temps avant de s’effacer complètement, mais du temps, ils en avaient énormément. Ils avaient toute la vie devant eux, et ils étaient plus que prêts à en profiter. Et surtout bien décidé. Il suivit le regard furtif qu’Akira lança au-dehors, et fut à son tour étonné de voir qu’il faisait nuit. Il ne s’était même pas aperçu de l’obscurité qui régnait dans la salle et il ne distinguait plus que les contours de son ami. Pourtant il y a encore quelques minutes… ou quelques heures ? Mais que pouvait-il bien en avoir à faire ?

Je pense que j’ai une faim de loup, et que vérifier si c’est un rêve ou non autour d’une bonne assiette de ramen nous fera le plus grand bien

Son estomac ponctua ses paroles d’un adorable gargouillis, qu’il accompagna d’un rire sonore.

Je crois même que c’est urgent, je n’ai pas envie de mourir de faim avant d’avoir pu profiter un minimum de toi, alors ne perdons pas de temps, on en a déjà laissé bien trop derrière nous pour ça.

Il sourit et s’empara de la main d’Akira, qu’il traîna derrière lui sans ménagement, jusqu’à la sortie du gymnase. Lorsqu’il ouvrit la porte un vent frais les accueillit, et ce comme… une renaissance. Il était entré ici pour se détendre, pour oublier un peu sa souffrance, et il en ressortait avec un ami. Avec Son ami. La vie parfois, nous réservait des surprises qu’on n’oserait pas même espérer. Il lança un regard à Akira, près de lui, et il fut certain qu’il avait la place idéale, et qu’il ne pourrait jamais être plus heureux que là où il était. Aux côtés d’Akira, et ce jusqu’à la fin de sa vie. Ou plus même, pourquoi pas ? Il n’est pas interdit d’espérer…