Shin' is in the place [PV]

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Ruki fixait le liquide diaphane à teintes auburn tourner autour de sa cuillère, celle-ci effectuant depuis une bonne demi-heure un mouvement circulaire dans une tasse posée quant à elle depuis le début de son service sur le comptoir devant laquelle l’androgyne se trouvait être assis. Le thé devait être froid depuis un moment, déjà, mais le châtain ne se sentait ni l’envie de le réchauffer, et encore moins de le boire. En fait, pour se montrer sincère jusqu’au bout, Ruki n’avait envie de rien. Pas qu’il se sentait spécialement triste, ou déprimé, ou même mélancolique.. Juste embêté de se trouver là ce soir. Pourtant, le jeune homme était du genre bosseur, surtout lorsque ses efforts étaient récompensés, mais il fallait croire que sa motivation s’était faite la malle pour la soirée, et la nuit. Et il préférait ne pas songer à la raison, qui se trouvait être en la personne de son frère cadet, Dan. Réprimant un soupir en relevant brièvement les yeux en entendant la porte du convinience store s’ouvrir, Ruki se désintéressa cependant de l’adolescent venant de pénétrer dans le magasin pour se relever, sa tasse à la main, résigné.

L’arrière-boutique possédait un petit coin « cuisine » qui se limitait cependant à un lavabo, quelques verres, un micro-onde et un petit frigo où les employés pouvaient déposer leurs casse-croûtes quotidiens. Lui-même s’en servait relativement souvent, ses horaires étant de 18h à 22h, mais il déposait plus souvent ses bouteilles d’eau que ses nouilles instantanées, pour une bête histoire de conservation. Et de santé, accessoirement. Ruki déposa sa tasse dans le lavabo, et s’essuya ses mains pourtant propres et sèches sur son pantalon avant de revenir à la caisse, prenant néanmoins son temps. Il n’y avait actuellement qu’un seul client dans le magasin – le jeune châtain arrivé il y a peu –, alors même s’il lui prenait l’idée sotte et grenue de voler, il n’aurait pas eu le temps d’emporter grand-chose. Et puis Ruki se sentait d’humeur magnanime – stone –, aujourd’hui, alors malgré son dégoût pour la malhonnêteté, il aurait sûrement laissé couler. Après réflexion, il aurait peut-être même préféré cette situation. C’est en tout cas ce qu’il se surprit à penser lorsqu’un tintamarre métallique retentit dans le magasin entier.

Alors qu’il venait à peine de se rasseoir, Ruki releva les yeux, surpris, en direction du grabuge pour le moment invisible de sa place. Mais, son travail comprenant aussi le fait de réagir rapidement et efficacement en cas de dérangement, le châtain s’obligea à se relever pour parcourir les rayons, rapidement, et arriver sur les lieux du désastre, où l’adolescent jurait comme un charretier à renfort de gestes aussi agacés que le laissait présumer son expression. Réprimant son second soupir en à peine cinq minutes de temps, l’androgyne replaça une mèche rebelle de sa frange en place et s’avança vers les boîtes de conserve pour s’agenouiller et sauver celles indemnes de la sauce nauséabonde. Enfin, d’après l’aîné qui ne supportait qu’à moitié les plats sous vide d’air de ce genre, mais ça. Ce faisant, il s’apprêtait à assurer au client que ce n’était rien, ou du moins pas très grave, mais celui-ci le prit de vitesse en reportant la faute sur.. ses épaules. Ben voyons. Cette soirée était définitivement à classer dans la catégorie ‘foireuses et à oublier d’urgence’. En attendant, il était en plein dedans, et il allait falloir improviser.

« Je vous prie de nous excuser.. » souffla-t-il à contrecoeur, ne voulant néanmoins pas jouer à celui qui aura le dernier mot quant à cet incident, même s’il n’allait sûrement pas se gêner pour faire remarquer à cet adolescent remarquablement culotté – tiens, encore un, fallait croire qu’il les attirait – que son rôle dans cette histoire devait au moins être le principal. Au moins. Malgré ses ressentiments actuels plutôt houleux, la voix de Ruki restait aussi calme et posée qu’à son habitude. Son expression aussi, d’ailleurs. Sa sérénité naturelle n’était pas prête de le quitter, de toute façon, vu le chemin qu’empruntait sa vie. « Néanmoins, et sauf votre respect, je tiens à vous rappeler qu’il est explicitement marqué, à l’entrée, que les sacs et autres bagages doivent être déposés à la caisse avant tout achat que ce soit. Même si nous ne sommes pas dogmatique à ce sujet, cela évite parfois quelques désagréments. » rajouta-t-il, levant brièvement des yeux insipides vers le jeune homme, avant de se relever pour déposer les boîtes de conserves indemnes sur les étagères prévues à cet effet. Si l’adolescent relevait son sous-entendu, tant mieux ; en tout cas, il ne fallait pas compter sur lui pour lancer un débat sur ce qu’il s’était passé. Même s’il allait devoir aller chercher la serpillière, chose embêtante en soi sachant que sa collègue précédente avait tendance à oublier qu’un balai se nettoie toujours après utilisation..

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Ruki, inconscient de l’avantage que lui assurait son androgynie dans la situation actuelle, inclina légèrement sa tête sur le côté en remettant en place la dernière boîte de conserve, se demandant si son employeur remarquerait le manque de revenus par rapport aux produits « vendus » de la journée. Sûrement pas, étant donné qu’avec un peu de chance, sa femme n’aurait pas à venir se mêler des comptes, et qu’elle était la seule des deux à être aussi pointilleuse. Espérant intérieurement ce scénario pour le bien-être de son travail, le châtain fit volte-face avec l’intention de s’éclipser dans l’arrière-boutique où la fameuse serpillière l’attendait, mais l’adolescent râleur (et culotté) envisagea la situation autrement. En sentant le contact froid de ses doigts sur son visage, l’androgyne cilla d’étonnement, remontant son regard dans le sien pour y chercher une réponse à ce comportement incongru, ne tardant pas à faire une tronche de poiscaille, les lèvres en avant, lorsque le châtain resserra ses doigts au niveau de sa mâchoire. Etait-ce une habitude chez les personnes telles Kei et son vis-à-vis actuel de le tripoter de cette manière dès la première rencontre ? Si c’était le cas, il allait falloir que ça change, parce que ça devenait gênant..

La voix se transforma en murmure, et le susurrement doucereux le fit ciller de nouveau sans lui faire perdre pour autant son expression paisible ne serait-ce qu’un quart de seconde. Il prit simplement le temps de se masser la joue du bout des doigts lorsque l’adolescent le relâcha, assimilant peu à peu sa phrase. Ses torts ? Apparemment, son sous-entendu n’avait pas été décelé. Tant mieux, en un sens, parce que si le jeune homme qui lui faisait face était actuellement satisfait, Ruki n’osait imaginer sa réaction en cas de susceptibilité. Souvent, on lui avait répété que son attitude posée en toute circonstance était étrange ; pour lui, c’était les impulsifs de ce genre qui méritaient le qualificatif d’incompréhensibles. Ah, quel ennui.. Enfin. L’androgyne haussa les épaules, prêt à passer outre, mais le client lui présenta les deux produits qu’il avait vraisemblablement l’intention d’acheter pour lui faire une sorte de chantage. Partir sans payer alors qu’il venait de bousiller trois produits qu’il aurait en temps normal dû payer si une personne d’autre que Ruki avait été de service ? Ce dernier sentit comme une impuissance douloureuse l’emparer, tandis qu’il se sentait encore plus désillusionné par rapport à la race humaine, et son devenir. Connerie.

« Un dédommagement ? Si vous y tenez.. » souffla-t-il d’un ton égal, avant de tourner les talons en direction de la caisse, lançant par-dessus son épaule sans jamais changer d’intonation de voix, de démarche ou d’expression : « Néanmoins, vous épargnez un temps d’attente en vous privilégiant en temps que client devrait suffire.. pour cette fois. Hmm ? » La provocation était ouverte, cette fois-ci. Elle n’était ni malsaine, ou même moqueuse, mais Ruki ne se sentait pas d’humeur à jouer la bonne poire ce soir. Gentil, parfois niais, mais sûrement pas con. Aussi, il avait pleinement conscience d’utiliser les mêmes mots que son cadet, ainsi que l’absence d’autres clients que celui-ci dans le convini. Cependant, arrivé au bout de l’allée, il s’immobilisa, avant de se retourner de trois quarts pour planter ses yeux dans ceux de l’adolescent, croisant ses bras dans son dos, signe d’amusement dans son propre langage. Parce que sourire alors qu’il était assez inexpressif, surtout dans ce moment-là, ce serait assez dérisoire. « J’aurais une question. Rien ne vous empêche de partir sans payer, désormais, étant donné que je serai bien incapable de vous forcer à quoi que ce soit. Mais pensez-vous que votre honneur s’en remettra ? » demanda-t-il, pour incliner sa tête sur le côté, poussant le vice un peu loin. « Juste au cas où l’idée vous aurait effleuré l’esprit.. »

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[Faut trouver une idée pour reprendre tout ça, sinon ça risque de se terminer bientôt =/]

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La réponse de l’adolescent ne se fit pas attendre. Directe, acerbe et blessante. Le châtain n’avait pas tort, et Ruki ne pouvait le nier. Mais son honneur avait été fissuré par Yûsuke des années auparavant, bien que sa mémoire n’en porte plus aucune trace. Inconsciemment, cependant, il savait qu’il était imperméable aux attaques portées à sa fierté. Malgré les morceaux recollés, celle-ci ne pouvait pas être en plus piteux état qu’actuellement, aussi endurait-elle tout sans rechigner, et sans grande douleur. L’androgyne n’eut donc aucunes réactions notables, à part peut-être celle de se relever, mais ça, c’était uniquement par confort personnel. Il se tuait déjà au travail et ses yeux étaient soulignés par des cernes certes discrètes mais présentes, il ne manquerait plus qu’il se coltine un mal de dos.. Ruki ne savait pas trop s’il devait répondre quelque chose à cette attaque personnelle qu’il considéra néanmoins comme totalement désespérée. Le jeune homme coupa court à sa réflexion en s’avançant vers lui pour poser quelques pièces dans sa main. Aucune réaction. Ruki hocha vaguement la tête de satisfaction, tout au plus. Mais pas pour lui. Pour ce garçon. Parce qu’il considérait la conscience comme la plus cruelle des punitions.

« Merci de votre achat. » fut la seule réponse de Ruki, sur le même ton calme, voire monocorde. Il ne releva pas la seconde allusion à une entité féminine, étant peut-être trop habitué à cela, ou alors se concentrant davantage sur le reste de la phrase. Il ne vérifia pas le compte, non plus ; quelle utilité, après tout ? Le client avait payé, c’était le principal. Il repartirait serein, et lui-même n’aurait pas de problème avec ses employeurs. Saluant machinalement celui-ci d’un signe de tête, Ruki s’apprêtait à faire volte-face pour retourner à la caisse lorsque le tintement caractéristique d’un magasin relativement basique résonna dans les rayons. Un simple coup d’œil à la porte, et le châtain aurait dû s’y désintéresser, comme à l’accoutumée. Néanmoins, cette fois-ci, il s’immobilisa et suivit le brun des yeux, paraissant pour la première fois depuis le début de l’entrevue clairement surpris. Le jeune client tourna les talons à son tour, s’apprêtant sûrement à partir ou quelque chose dans ce style ; Ruki n’en savait rien, et s’en fichait, pour dire vrai. Pourtant, il tomba nez à nez avec le nouvel arrivant qui le regarda du haut de ses 1m75 avec un certain dédain. Pourtant, ses yeux pâles s’immobilisèrent sur la canette tenue par celui-ci, et, sans crier gare, il la lui prit des mains sans un mot pour le contourner en buvant une gorgée, air de rien.

« Dan. Excuse-toi immédiatement. » Intervint Ruki quasiment immédiatement, son étonnement premier faisant place à un dépit et un mécontentement certain, à peine perceptible, que ce soit dans sa voix ou son expression redevenue calme et posée. Pourtant, son petit frère le décela quasiment immédiatement et lui jeta un regard goguenard, à peine intimidé. Malgré leur année de différence, Dan mesurait une bonne tête de plus que lui, et semblait bien mieux constitué que lui. « Tu bosses ici. Redonne-lui en une autre. Ça suffira. » siffla l’interpellé entre ses dents, clairement menaçant envers son aîné qui cilla à peine, semblant complètement zapper l’autre protagoniste pour l’instant. « Dan, je ne me répéterai pas. » insista l’aîné en voilant sa voix d’une autorité là encore à peine perceptible, mais digne d’une mère protectrice prête à tirer les oreilles à son enfant. « Oh, Ruki, je t’ai connu plus affable que ça.. Qui c’est, pour que tu réagisses comme ça ? Ton copain ? » railla Dan pour toute réponse en posant un regard critique sur l’intrus de la scène, et, cette fois-ci, Ruki fronça les sourcils sous l’affront. S’il était capable de rester passif et d’encaisser calmement les répliques acerbes d’un inconnu, il était facile pour ses fraternels de le faire réagir en le provoquant ouvertement de cette façon. Pas qu’il craignait le jugement des autres, ou même leurs regards, mais l’affection qu’il leur portait avait du mal à le digérer.

[ Ça te suffit, comme idée ? x3 ]

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Lorsque Dan reporta son attention sur son frère aîné, son sourire arrogant et provocateur se volatilisa au profit d’une expression plus troublée. Il détestait lorsque Ruki le fixait de cette manière, à peine expressif en lui transmettant pourtant plus de sentiments qu’il ne pourrait jamais le faire en quelques phrases bien formulées. Et le brun s’apprêtait à le lui faire remarquer, de manière caustique et enveloppée dans des draps doucereux bien évidemment, lorsque le châtain s’en mêla, lui arrachant à son tour la cannette des mains. Dan ne chercha pas à la retenir, ayant déjà bu la gorgée qu’il désirait en arrivant, et lui jeta un regard désintéressé avant de s’immobiliser au cliquetis métallique caractéristique lorsque l’objet cylindrique heurta le sol. Lentement, son regard se baissa sur le liquide bleuté qui se répandait à la fois sur le sol et sur ses chaussures, tandis que son frère passait une main dans ses cheveux attachés, vraisemblablement embêté. Pas parce qu’il allait avoir un peu plus de boulot sur le dos, mais surtout pour l’état des pompes de son cadet. Ça s’annonçait difficile à nettoyer, ça..

Mais avant même que Ruki n’en case une, alors qu’il avait l’intention de calmer le jeu en se proposant d’offrir une canette au client pour se faire pardonner – parce que, cette fois-ci, il avait confiance que les Sakahara étaient en tort –, le bruit retentissant d’une étagère que l’on percute en répandant son contenu sur le sol en un bruyant fracas le fit sursauter. Il comprit avant même de voir la scène que Dan, toujours aussi impulsif, avait attrapé le châtain par le col pour le plaquer sans douceur contre la dite étagère qui tanguait dangereusement de droite à gauche, menaçant de tomber à tout moment. « Dan, lâche-le immédiatement. » ordonna Ruki, réagissant au quart de tour, en posant sa main sur le bras de son frère pour tenter d’y faire pression pour l’obliger à lâcher l’adolescent. Mais au milieu de ce fouillis de violence et de colère, la chose la plus déroutante restait le calme posé du benjamin, dont l’expression ne paraissait qu’à peine plus troublée avant ces malheureux événements. Dan, quant à lui, se contentait de fixer son vis-à-vis, une lueur meurtrière au fond des yeux, même si l’intervention de son frère le fit légèrement relâcher la pression qu’il exerçait sur le cou du châtain clair.

« Il saccage ton lieu de travail, et me provoque ouvertement. Je devrais rester passif ? » gronda l’interpellé d’une voix tremblante de colère en baissant les yeux vers l’androgyne qui se faufilait carrément entre les deux protagonistes, ce coup-ci, voulant apparemment éviter des blessés inutiles, qu’ils soient du côté familial, ou non. Même si le dos de l’adolescent inconnu devait désormais être strié de rouge au niveau des barreaux de l’étagère, mais ça. « C’est mon problème, Dan. Lâche-le. » commença Ruki, autoritaire, mais il ne réussit qu’à obtenir un ricanement moqueur de la part de son cadet, qui relâcha néanmoins sa « victime », celui-ci obtenant de la part du vendeur un regard sondeur, ce dernier vérifiant que son client n’avait rien mis à part sa rencontre fortuite avec une étagère d’exposition. « Le cas échéant, tu l’aurais dit à papa, c’est ça ? Ne me considère pas comme Otoe, Ruki. Je suis un adulte, maintenant. » répliqua Dan d’un ton qui se voulait détaché mais encore clairement agacé, en jetant un regard appuyé à son frère aîné. Qui ne cilla qu’à peine. « Si tu étais un adulte, Dan, tu aurais le bon sens de partir d’ici avant même que je ne t’en fasse la remarque. » Ruki se retourna vers le châtain l’instant d’après, snobant carrément son cadet qui, lui, reniflait de dédain, pour lui demander d’une voix placide s’il allait bien. Ce qui ne l’empêchait pas d’être sincère, entendons-nous bien.

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Dan ajusta sa veste d’un mouvement de poignet agacé, démontrant néanmoins un certain mépris vis-à-vis du châtain clair, laissant un regard condescendant glisser sur la silhouette de ce dernier. S’il s’était limité à le provoquer en un autre lieu, loin de la présence et surtout du regard de Ruki, le brun n’aurait sûrement pas réagi aussi violemment. Mais, contrairement à son frère aîné, il avait une fierté intacte, et assez imposante, ne supportant pas de se faire ainsi ridiculiser devant un membre familial, surtout en période de crise d’adolescence. Et puis, objectivement, en l’attaquant, ce garçon avait en quelque sorte attaqué son frère, et même s’il ne l’avouerait jamais, Dan se montrait de plus en plus protecteur envers ce dernier. Un remboursement personnel des années que celui-ci avait sacrifiées pour eux, en somme. Ruki, quant à lui, inconscient de cette attention quelque peu étouffante, hocha la tête, à la fois rassuré et satisfait, lorsque son malheureux client lui certifia aller bien. Son air stupide, et son regard d’incompréhension, l’androgyne ne les avait pas relevés. Autant ne pas aggraver la situation, après tout.

Après un rapide accord de force entre l’aîné et le cadet à grand renfort de regards noirs, le premier repartit se chercher une canette sous le regard bienveillant du vendeur. Au moins, celui-ci avait assez de bon sens pour ne pas pousser la provocation trop loin et par-là même envenimer la situation. Du moins était-ce la pensée qu’eut Ruki, un quart de seconde avant que le châtain ne reprenne la parole pour prononcer des mots qu’il redoutait. Il ne réagit pas immédiatement, semblant marquer un temps à la féminité qu’on lui imposait, mais se reprit néanmoins assez rapidement pour attraper fermement le poignet de son petit frère au passage, le freinant assez pour l’empêcher de se ruer sur l’inconnu pour lui faire subir il ne savait quelles souffrances. Surtout que Dan était du genre kamikaze, réfléchir avant d’agir, et que, souvent, il était celui qui essuyait le plus de blessures lors d’une bagarre qu’il provoquait, mais ça. « Qui se laisse marcher sur le pied ?! Si tu connaissais Ruki, tu.. » rugit-il en un premier temps, s’immobilisant en sentant son frère le retenir pour éviter de traîner celui-ci le long de l’allée.

Mais le dit Ruki intervint de nouveau, haussant légèrement la voix sans pour autant changer de ton une seule seconde, ce qui était suffisant pour faire taire le brun, quoique celui-ci restait à foudroyer le jeune homme du regard. « Dan, cesse de lui donner raison. Tu agis effectivement comme un adolescent en crise. » commença-t-il posément en échangeant un regard équivoque avec l’interpellé, qui, curieusement, semblait s’être pris une douche froide sur le coin de la tronche, mais Ruki ne s’y attarda pas pour reporter son attention sur son client quelque peu perturbateur, gardant le poignet du brun au creux de sa main. Juste au cas où. « Ne vous illusionnez pas, vous êtes le seul, ici, qui se montre impertinent. Néanmoins, nous ne voudrions abuser de votre si précieux temps, aussi vous invité-je à quitter ces lieux avec vos achats. Inutile de payer la seconde boisson. » psalmodia-t-il, relâchant enfin son frère dont il sentait les muscles se relâcher, avant de sembler se souvenir de quelque chose, refaisant face à l’adolescent se tenant à l’écart. « Et, au risque de vous décevoir, je suis un jeune homme. Je vous souhaite une excellente soirée. » souffla-t-il, avant de s’agenouiller pour ramasser les produits éparpillés sur le sol, tirant sur la manche de son frère pour lui ordonner de l’aider, celui-ci fronçant vivement les sourcils de désapprobation, pour le coup.

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Dan s’apprêtait à râler contre son frère, et puis le bon Dieu, mais surtout contre l’autre abruti de châtain à la canette, ainsi que contre le monde entier, pourquoi pas, parce qu’il était tout à fait injuste qu’il soit celui qui aide à ramasser et à ranger la pagaille amassée alors qu’il n’avait strictement rien à se reprocher, sans déconner, lorsqu’un nouveau bruit sourd de chute résonna dans l’allée. Le brun tourna la tête, surpris, vers leur aîné qui lui fixait – examinait ? – Ruki avec au moins la même stupeur que lui. L’androgyne, un paquet de chips entre les mains, suivit la canette des yeux lorsque celle-ci roula sur le sol dallé du magasin, n’allant cependant pas bien loin vu l’encombrement actuel du passage, avant de lever ses yeux sombres vers le jeune homme fautif, laissant cette fois-ci apercevoir une pointe d’étonnement à travers son sempiternel calme. Louchant sur le doigt pointé vers lui, le benjamin sembla un instant dérouté avant de lever une de ses mains, replaçant une mèche de sa frange en place, tic gestuel et nerveux qu’il effectuait lorsqu’il était pris au dépourvu. Se moquer de lui ? Pas vraiment, non..

Bien qu’habitué à ce qu’on le confonde avec une fille, Ruki ne s’attendait pas à ce genre de réaction un peu démesurée – surtout venant d’un gosse aussi arrogant.. – et ne prit dés lors pas la peine de répondre, même si cela pouvait passer pour de la condescendance hautaine, et ce malgré son air posé. Néanmoins, cela semblait tellement évident, à ses yeux, qu’il ne s’amuserait jamais à mentir sur un sujet aussi inintéressant, qu’il ne pensa pas à rattraper son erreur tandis que Dan éclatait d’un rire franc et joyeux, vestige de l’enfant sympathique et attachant qu’il avait été avant son entrée tumultueuse dans l’adolescence. Ruki n’avait pas songé non plus à corriger ce jeune homme plus tôt, étant donné que les e étaient la majorité du temps muets et qu’il n’était pas non plus aguerri à ce sujet. L’habitude, là encore, sans doute. Et c’est dans cette ambiance mine de rien un peu plus détendue que l’aîné ramassa sa canette pour leur claquer une nouvelle réplique cinglante, qualifiant au passage le châtain foncé d’objet – à ce qu’il en avait compris, du moins. Ambiance minée, le retour. Sortez les mouchoirs.

« Je vois que vous comprenez plutôt vite. » remarqua-t-il en permettant – Ô miracle – à son amusement infantile de percer sa voix qui reprit malheureusement un ton insipide pour la seconde partie de sa phrase, qui en fait se trouvait être une répétition néanmoins nécessaire vu la situation actuelle. « Je vous souhaite une excellente soirée. » Ruki se releva alors et, ne portant plus grande attention à l’adolescent inconnu étant donné que celui-ci n’avait apparemment plus rien à faire ici, il fourra le paquet à son frère en plantant un regard autoritaire dans le sien, calmant quasiment instantanément son fou rire précédent. « Tu as participé au désordre, tu participes au rangement. C’est légitime. D’ailleurs, pourquoi es-tu passé me voir ? » demanda-t-il en s’agenouillant de nouveau pour rassembler les poches à contenu salé près de lui. « Ouais mais euh, justement, je peux pas. C’était ça que j’étais venu te dire. Je sors, ce soir, et je pense dormir chez Daisuke. » répliqua Dan en déposant – balançant – le paquet sur l’étagère correspondante, avant de gonfler ses joues d’un air courroucé à la réponse de son grand frère, celle-ci se résumant à « Bien entendu. Je suppose donc que tu as des résultats aussi scolaires que ménagers concluants à me montrer en contrepartie. ». Le brun partit alors dans un grand exposé plan dissert trois parties intro développement conclusion pour convaincre l’androgyne. Quoiqu’il en soit, les deux jeunes hommes ne faisaient plus guère attention à l’intrus, désormais.

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